La Taxe Carbone retoquée

Mercredi, 30 Décembre 2009 11:19 Matchail
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Image de la première page du communiqué de presse du conseil constitutionnel

La Taxe Carbone a été retoquée aujourd'hui par le conseil constitutionnel, obligeant le gouvernement à repenser dans l'urgence son idée pour le 20 janvier.

Quelles sont les raisons de ce rejet par le conseil constitutionnel ?

Il y en a deux :

Des réactions diverses :

Le gouvernement commente très peu - que dire ! , il dit juste s'être fixé de proposer une autre version du projet d'ici le 20 janvier.

Evidemment, le PS jubile de ce revers politique pour Sarkozy, d'autant que ce sont eux qui ont saisi le conseil constitutionnel pour la loi de Finance qui contenait ce projet de Taxe Carbone, mais également la suppression de la Taxe Professionnelle (autorisée par le conseil, elle). Bayrou, pour le MoDem, exulte aussi.

Les Verts souhaitent que ce camouflet force le gouvernement à corriger les erreurs de la loi initiale, jugée « Tarabiscotée, inefficace et inégalitaire, la taxe carbone allait à l'encontre de ce que pourrait être une fiscalité écologique juste », et ajoutent : « nous sommes favorables à une vraie fiscalité écologique et la Taxe Carbone n'était absolument pas à la hauteur des enjeux ».

Après tout, cette loi pourrait être une vraie réussite si les émissions engendrées par la production d'électricité et par les industries les plus émettrices étaient concernées. Quand aux secteurs agricoles, à la pêche, au transport routier et maritime, puisqu'ils sont responsables d'énormément d'émissions et qu'il faut agir, il n'y a pas le choix : il faut les faire évoluer ! Il ne s'agit pas de les achever avec une taxe Carbone sans rien en échange, mais bien de proposer des solutions d'évolution à l'ensemble de la société, vers un fonctionnement moins émetteur, en parallèle à une taxe Carbone rendant plus onéreux le recours aux énergies fossiles.
A quoi bon, par exemple, faire payer la taxe Carbone au transport routier si l'on n'encourage pas à la relocalisation des productions - pour celles qui sont possibles en France - et à une augmentation des capacités de transport ferroviaire, fluvial et maritime ? Tant que le problème ne sera pas pensé dans son ensemble, comme un « projet de société ou de civilisation », et qu'on se contentera d'une vision simpliste (ou de greenwashing gouvernemental, si l'on considère le montant faible de la Taxe Carbone initialement prévue), je vois mal comment une réforme "écolo" pourrait être réussie et populaire...

Comme le souligne le vice-président du MoDem cité par le Monde, il y a d'autres lois injustes et inégalitaires, mais cela qui ne justifie pas d'en créer une nouvelle.

Faut-il donc se réjouir de la décision du Conseil Constitutionnel ?

Oui, si on avait la moindre raison d'attendre du gouvernement qu'il propose quelque chose de plus juste, et concernant toute l'énergie, donc également l'électricité. Mais comme Arnaud Gossement, de l'association France Nature Environnement, mon avis est que le gouvernement, pour des raisons électorales et pour défendre les intérêts déjà protégés lors de la première proposition, ne fera pas mieux la deuxième fois.

Doit-on écouter cet élu disant que « le mieux est l'ennemi du bien » ? Peut-être. Il se pourrait que le conseil constitutionnel ait signé l'arrêt de mort de cette initiative gouvernementale.

Comme l'avaient souligné Noël Mamère et Cécile Duflot lorsque les modalités de la Taxe Carbone avaient été fixées, telle que présentée par le gouvernement, la fiscalité écologique, sous la forme prise par la Contribution Climat-Energie, risquait d'être discréditée pour longtemps aux yeux des citoyens français qui devaient en payer l'essentiel, et pour une efficacité plus que limitée. Cette mesure allait donc être probablement plus néfaste qu'utile, même si elle allait dans le bon sens, car elle rendrait l'opinion publique méfiante vis à vis de la fiscalité écologique, empêchant durablement de faire passer d'autres mesures écologiques. Il suffirait de dire "rappelez-vous de la Taxe Carbone" pour mettre les rieurs et les dubitatifs dans son camp.
Il faut agir rapidement pour le Climat, malgré l'échec de Copenhague, mais pas si c'est pour faire n'importe quoi ! Au pire, je préfère attendre 2012 et la victoire d'un parti pour qui l'écologie est au coeur de la société (et pas au coeur de la com')...

Donc oui, il faut remercier le Conseil Constitutionnel. Cela dit, le pire n'étant pas encore certain, et le gouvernement ayant l'air de tenir à sa Taxe Carbone quasiment autant qu'à sa loi Hadopi (c'est dire !), continuons à faire pression pour que le gouvernement soit bien inspiré et présente un bon projet de fiscalité écologique ! Ça fait du bien de rêver, de temps en temps.

A lire aussi :

La réaction de Denis Baupin sur différents réseaux : http://www.mediapart.fr/node/71810